« L’égalité entre les femmes et les hommes en temps de crise »
12 septembre 2013 – CESE
L’introduction de Geneviève Bel, Présidente de la Délégation aux droits des Femmes et à l’égalité au Conseil Economique, Social et Environnemental résume parfaitement la situation des femmes dans notre pays :
« À la veille du début de l’examen au Sénat du projet de loi-cadre sur l’égalité entre les femmes et les hommes et en présence de personnalités fortes et engagées, dont le nom restera à jamais attaché à la défense et à la promotion des droits des femmes dans toutes les sphères de leur vie, privée, politique, économique ou sociale, cette journée « bilan et prospective » est particulièrement bienvenue et je suis très heureuse de vous accueillir au CESE.
Yvette Roudy, Édith Cresson, Gisèle Halimi, pour ne citer qu’elles, témoigneront d’avancées conquises de haute lutte, Roselyne Bachelot et Marie-Jo Zimmermann savent, l’une comme l’autre, qu’une vigilance constante est requise et qu’il ne faut jamais lâcher prise.
Najat Vallaud-Belkacem, Ministre des Droits des femmes de plein exercice, a repris le flambeau avec le souci d’aborder tous les aspects de la problématique de l’égalité entre les femmes et les hommes dans une perspective intégrée.
Comme l’a fort bien souligné ma partenaire et amie, Brigitte Gonthier-Maurin, Présidente de la DDFE du Sénat, dans le rapport d’information sur le projet de loi prochainement en discussion, « l’inégalité entre les femmes et les hommes constitue un phénomène social unique dont les différentes composantes entretiennent entre elles des liens complexes et qui appelle de ce fait une réponse globale ».
Malgré un arsenal juridique impressionnant, notamment 9 lois consacrées depuis 40 ans à la promotion de l’égalité professionnelle, les chiffres sont résistants et implacables : des écarts de rémunération (annuelle brute) importants, de l’ordre de 25%, y compris chez les cadres, se maintiennent entre femmes et hommes, dont 9 % inexpliqués et qui semblent bien relever d’une véritable discrimination selon la DARES ; depuis la loi fondatrice du 6 juin 2000, les progrès de la parité politique sont extrêmement lents : on ne compte que 27 % de députées, 22% de sénatrices et 44% de membres du CESE uniquement sous l’effet de dispositions contraignantes.
Quant à l’égalité entre les femmes et les hommes en temps de crise, elle est assurément mise à mal car ainsi que l’a mis en évidence la dernière étude publiée par notre DDFE – dont des exemplaires sont à votre disposition – la précarité a hélas un visage de femme : le travail à temps partiel est féminisé à 82%, les deux tiers des salariés à bas salaires (66%) sont des femmes et dans 86 % des cas la monoparentalité qualifie la situation d’une mère avec un ou plusieurs enfants.
Les états de tension économique et sociale sont également propices à une expression démultipliée de toutes les formes de violences dont les femmes sont les victimes privilégiées : un peu plus de 400 000 femmes par an sont victimes de violences conjugales dont près de 130 sont décédées en 2012 sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint et environ 150 000 subissent un viol chaque année (hors ménage).
Près d’une femme sur trois, contre un homme sur cinq, est exposée à des violences en milieu de travail et surtout, quels que soient leur degré et leur intensité, les violences envers les femmes ont toujours un caractère sexiste et sont motivées par la volonté de rabaisser, soumettre, avilir.
C’est d’ailleurs dès leur scolarité que de nombreuses filles sont confrontées à des comportements ou propos sexistes qui font le lit de la violence puisqu’un sondage IFOP, réalisé en novembre 2012 auprès de jeunes femmes de 18 à 25 ans, a révélé que plus des deux tiers de cette population (68%) ont déjà été victimes de violences qui, pour 61% d’entre elles se sont déroulées dans leur établissement l’enseignement, sans faire l’objet de véritables sanctions.
Je n’irai pas plus loin dans ces exemples illustratifs des thèmes qui vont être développés tout au long de cette journée. »
Les études en cours d’élaboration à la DDFE : « Les femmes éloignées du marché du travail » et « Combattre toutes les violences faites aux femmes, des plus visibles aux plus insidieuses » sont aussi en lien direct avec les débats que nous allons avoir.
Loin d’être une punition ou une contrainte, l’égalité effective entre les femmes et les hommes est l’avenir de notre société. C’est aussi un outil d’efficacité économique et les hommes en tireront largement bénéfice car l’égalité professionnelle est un vecteur de libération des normes sexuées qui pèsent tout autant sur eux que sur les femmes.
De plus, selon le scénario de Jean Pisani-Ferry pour la France dans 10 ans, les femmes pourraient occuper près de la moitié des emplois, soit une proportion supérieure à leur part dans la population active.
Ce sera une vraie force pour faire évoluer les systèmes de management et promouvoir la mixité à tous les niveaux.
Pour toutes ces raisons, l’égalité entre les femmes et les hommes en temps de crise est bien une chance à saisir pour en sortir plus vite. »