Reconnaître le contrôle coercitif : une étape clé pour mieux protéger les victimes
Le CNFF appelle à une reconnaissance pleine et entière du contrôle coercitif dans la loi française. Cette forme de violence, souvent invisible mais déterminante, regroupe l’ensemble des comportements de domination qui restreignent la liberté et l’autonomie des victimes. Malgré des avancées en 2025, le texte législatif est encore en attente de seconde lecture à l’Assemblée nationale. Pour le CNFF, seule une définition claire dans le code pénal et le code civil permettra d’unifier les pratiques judiciaires et d’assurer une protection efficace des femmes et des enfants face aux violences intrafamiliales.
Il y a un an, soit le 25 novembre 2024, le CNFF publiait un communiqué dont le sujet était : « Pour une approche globale des violences intrafamiliales : LE CONTROLE COERCITIF » Annexe 1
Depuis le printemps 2025, les mouvements féministes attendent que le législateur intègre le concept du contrôle coercitif dans le code pénal. Si les chiffres 2024 du rapport de l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles sont alarmants, ceux-ci nous obligent à l’exigence. Exigence vis-à-vis du législateur, exigence vis-à-vis de tous les acteurs de la chaîne judiciaire, exigence vis-à-vis de tous les professionnels qui ont à connaître des violences faites aux femmes alors que par ailleurs dans beaucoup de situations les enfants
sont également victimes.
S’interroger sur le faible pourcentage de dépôts de plainte (30% en 2024) pour violences intra familiales interpelle aussi sur la confiance de ces victimes en notre système judiciaire.
- Les protège-t-il ou non ?
Le Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes a publié son rapport « Mettre fin au déni et à l’impunité face aux viols et agressions sexuelles » le 24 septembre dernier, lequel rapport « analyse le parcours des victimes tout au long des obstacles et des épreuves qu’elles traversent, des lacunes dans l’accueil de leur parole, aux procédures judiciaires qui réveillent leurs traumatismes et enfin le procès, quand il intervient, très souvent difficile pour les victimes. » « Les classements sans suite sont massifs et inexpliqués » (AFP 24 septembre 2025)
Il est essentiel que les plaintes déposées par les victimes de violences conjugales soient instruites de la même manière par les parquets, les forces de l’ordre sur tout le territoire, en tenant compte des actes de domination au quotidien de l’auteur sur sa victime, de ses antécédents judiciaires… Admettre l’importance du contrôle coercitif, c’est appréhender la dangerosité d’un auteur et donc tout mettre en oeuvre pour le tenir à distance de sa ou ses victimes. Or, l’instruction des dossiers, la jurisprudence rendue, sont à géométrie variable.
Il est donc essentiel que le législateur inscrive dans la Loi le concept du contrôle coercitif afin que tous les acteurs soient dans l’obligation de s’en emparer pour désormais générer une approche différente de l’instruction de ces affaires : qu’à fait l’auteur pour que nous en arrivions à cette situation ?
La jurisprudence de la Cour d’Appel de Poitiers du 31 janvier 2024 ainsi que les travaux de Madame Andreea GRUEV-VINTILA, Maîtresse de conférences HDR en psychologie sociale à l’Université de Paris-Nanterre ont permis de mieux appréhender le cycle des violences conjugales, cycle dont il faut tenir compte pour protéger les victimes. Si cette
jurisprudence est aujourd’hui suivie par d’autres juridictions, seule l’inscription dans la loi du concept permettrait de l’uniformiser sur tout le territoire.
Rappel : la proposition de Loi a été déposée par Madame Aurore BERGE, alors députée, cosignée par 112 députés, le 3 décembre 2024. Cette proposition, après modification, a été adoptée par l’Assemblée Nationale le 28 janvier 2025. Le Sénat, le 3 avril 2025 a adopté une version modifiée de cette proposition pour faire du contrôle coercitif non plus une infraction autonome comme demandé initialement, mais une nouvelle forme de harcèlement conjugal. Ainsi, la définition du délit de harcèlement sur conjoint est étoffée par celle d’une attitude coercitive : « les propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet de restreindre gravement la liberté d’aller et venir de la victime ou sa vie privée ou familiale ou de contraindre sa vie quotidienne par des menaces ou des pressions psychologiques, économiques ou financières. »
Depuis le 4 avril 2025, le texte a été transmis à l’Assemblée Nationale pour une deuxième lecture qui n’a pas encore eu lieu.
